Investir dans les pioches et les pelles
Lors de la ruée vers l’or de 1848-1855 en Californie, des milliers d’aventuriers sont partis à la recherche du précieux métal jaune. Si certains ont trouvé quelques pépites, nombreux sont ceux qui sont repartis bredouilles et qui ont perdu beaucoup d’argent. À l’inverse, ceux qui vendaient des pioches et des pelles ont largement profité de cette “fièvre de l’or”. Bien que ce commerce soit moins excitant que la découverte d’un filon, ces marchands ont engrangé des profits importants.
Les marchands gagnent plus que les prospecteurs
Aujourd’hui, nous nous trouvons au milieu d’une transition de 30 ans vers la décarbonisation de notre économie. Et les “métaux de transition” apparaissent comme une opportunité d’investissement particulièrement intéressante, à l’instar des vendeurs de pioches et de pelles d’antan. De fait, les investisseurs s’efforcent actuellement de trouver les pépites d’or, c’est-à-dire les futurs leaders du marché des véhicules électriques, de la fabrication de batteries, de la production d’énergie éolienne, des services publics d’électricité ou encore de la fabrication de panneaux solaires. Mais toutes ces entreprises devront recourir massivement aux métaux de transition, qui pourraient bien devenir les vrais gagnants de cette tendance.
Des métaux indispensables à la transition
Utilisé dans les batteries des ordinateurs portables, des smartphones et des véhicules électriques, ainsi que pour le stockage de l’énergie, le lithium est un métal essentiel. On le trouve dans des gisements miniers et dans des mares de saumure et des salines riches en lithium. Les « terres rares », ces métaux comprenant le néodyme, le dysprosium et le praséodyme, sont utilisées pour fabriquer des aimants permanents indispensables aux véhicules électriques et aux éoliennes. On peut trouver ces métaux en petites proportions dans de nombreuses régions du monde, mais c’est la Chine qui a été la plus active dans leur production et leur raffinage. Plusieurs sociétés basées en Amérique du Nord et en Australie sont également d’importants fournisseurs. De son côté, l’uranium revient en vogue comme combustible des centrales nucléaires pour remplacer le charbon, le fuel et le gaz naturel. Le Canada compte plusieurs entreprises exposées à l’uranium. Le cuivre bénéficiera directement du développement de l’électrification, car il sera incontournable pour développer le réseau électrique, câbler les véhicules électriques et connecter les éoliennes au réseau.
La Chine joue un rôle important dans la production et le raffinage de ces métaux de transition. Mais avant de se précipiter vers l’Empire du Milieu, il faut prendre en compte les risques liés à l’investissement dans un pays dont la structure juridique et économique est moins fiable. Il vaut donc mieux se concentrer sur les pays où l’intervention du gouvernement est moindre et le système juridique plus stable.
La législation récente aux États-Unis, telle que la loi IRA, et la législation à venir en Europe favorisent l’adoption de technologies énergétiques plus propres et vont donc augmenter la demande de métaux de transition. Par conséquent, il peut être judicieux d’investir dans les “pioches et les pelles” de cette importante tendance, qui devrait se poursuivre au cours des 30 prochaines années.
Article paru dans Le Temps, 6 février 2023
Investir dans les pelles et le pioches